Chaque mois, le CRREF organise des séminaires afin de permettre à des chercheurs de présenter leurs travaux. Ces séminaires sont ouverts au public et ils se déroulent soit dans les locaux de l’INSPE de l’académie de Guadeloupe dans les salles du Bâtiment E ou l’amphithéâtre, soit en webinaire : https://univ-antilles-fr.zoom.us/j/4336505018?pwd=aFZ5a0FOZy9qclI4eVltb2cxVkZoUT09
Pour toutes informations, veuillez contacter la Responsable des séminaires mensuels du CRREF, Mme Élisabeth Odacre (MCF en Sciences de l’éducation, INSPE de la Guadeloupe, Université des Antilles) : elisabeth.odacre@univ-antilles.fr
Séminaires de 2022-2023
Le jeudi 9 février de 16h30 à 18h
« L’évaluation de la qualité des dispositifs scolaires : une approche multidimensionnelle »
M. Philippe TREMBLAY
Professeure titulaire en Sciences de l’Éducation, Université Laval, Québec
Résumé : Depuis plusieurs années, le concept de dispositif est devenu présent dans le champ des sciences de l’éducation (Barrère, 2013). Plus spécifiquement, en ce qui concerne l’éducation et la scolarisation des élèves à besoins éducatifs particuliers, on assiste, en France et ailleurs, à un foisonnement de dispositifs (ULIS, SEGPA, IME, ITEP, UMA, coenseignement, co-intervention avec un EASH, etc.). Un dispositif est tout à la fois un objet concret et une abstraction (Figari, 2008a). D’une nature fortement polysémique et ayant différents avatars, le dispositif constitue un terme générique qui décrit un objet intermédiaire (mésostructure). Quatre principaux descripteurs du dispositif peuvent être utilisés : 1) une alternative à la pédagogie « magistrale », 2) une mise en situation pour la formation, 3) une approche technique des environnements quotidiens et 4) un mécanisme éducatif (Figari, 2008b). Utilisant cette dernière acception, un dispositif est ainsi tant la manière dont on agence les diverses composantes d’un « appareil », que l’appareil lui-même (Figari, 2008a). Il s’agirait, en somme, d’ « un ensemble intégré et structuré d’objectifs, de moyens et de personnes construit en vue de répondre à des besoins qui lui sont externes, assujetti aux contraintes qui lui sont imposées et redevable des effets, voulus ou non, qui peuvent lui être attribués » (Bouchard et Plante, 2002, p. 226-227).
Dans le cadre de cette conférence, il sera plus spécifiquement question de l’évaluation de la qualité des dispositifs scolaires destinés aux élèves à besoins éducatifs particuliers. Pour ce faire, le modèle multidimensionnel d’évaluation de la qualité des dispositifs scolaires (Tremblay, 2012) sera utilisé. Ce modèle d’évaluation de la qualité est composé de dix dimensions (pertinence, congruité, adéquation, synergie, efficacité, efficience, fiabilité, impact, bienfondé, flexibilité) ; dimensions qui explorent le lien de conformité entre les caractéristiques du dispositif (objectifs/finalités, population, ressources, environnement, actions, effets, espace-temps). De plus, chacune de ces dimensions doit être évaluée à partir de trois points de vue qui s’entrecoupent et se conjuguent : la qualité prescrite, la qualité perçue et la qualité réelle. En s’appuyant sur des analyses issues de travaux de recherches et des exemples issus du terrain, cette conférence sera l’occasion de se pencher et de réfléchir, d’une part, aux concepts de dispositif et de qualité en éducation, et d’autre part, sur les approches évaluatives et aux spécificités de la recherche concernant les dispositifs de scolarisation des élèves à besoins éducatifs particuliers en contexte inclusif.
Le jeudi 2 février de 16h30 à 18h
« Architecture scolaire en milieu tropical »
Mme Cécile BOURGADE
Professeure agrégée en arts plastiques, docteure en esthétique – Inspé de l’académie de la Martinique
Résumé : Cette intervention sur l’architecture scolaire vise à ouvrir la discussion sur les relations entre architecture scolaire et contexte. Elle fait suite à une recherche doctorale consacrée à l’identité dans l’architecture moderne brésilienne et de nouvelles orientations de recherche vers les problématiques propres aux sciences de l’éducation. Les études produites sur l’architecture scolaire en Europe euro-continentale ou au Canada présentent des typologies de bâtiments scolaires et des solutions inadaptées aux climats tropicaux (Técher 2019), or la relation entre l’école et l’architecture relève d’un contexte qu’elle exemplifie en retour. Pour cette raison et afin de répondre à des problématiques contextuelles spécifiques, il semble important de connaitre et de produire des études sur l’architecture scolaire en lien avec contexte antillais et par extension avec d’autres territoires ultra-marins. Les problématiques de ventilation ou encore celle du risque sismique sont de nature à fonder ces approches spécifiques et des questions relatives aux zones blanches ou aux implantations littorales d’édifices scolaires peuvent soutenir, pour leur part, des approches comparatives avec des zones extra-tropicales. Hormis la dimension climatique, l’architecture scolaire permet d’interroger les dynamiques sociales propres à des contextes localisés. Son rôle actif dans la construction des apprentissages justifie par exemple d’examiner la fonction de l’édifice scolaire comme troisième lieu (Oldenburg, 1989), nécessitant de défonctionnaliser les espaces pour accueillir des associations de quartier, de parents d’élèves ou encore des partenaires locaux. Le bâtiment scolaire comme espace de socialisation fréquenté par les enfants, les parents, les enseignants et les partenaires locaux conduit à dissocier la fonction scolaire de l’environnement d’apprentissage. L’approche holistique de cette perspective souligne l’importance de la prise en compte d’un contexte, du surcroît dans le cas antillais lorsque des épisodes climatiques destructeurs affectent le rapport à la pérennité du bâti. Historiquement, l’architecture scolaire passe de la standardisation d’édifices coupés du monde extérieur jusqu’au début du XXe siècle à l’adaptation spécifique au contexte par l’inclusion dans l’espace de vie géographique. L’exploitation du contexte physique (lumière, matériaux, jardins) « interdit une définition unique des espaces scolaires » (Mazalto, Paltrinierin 2013) tout en accompagnant, voire à suscitant des usages pédagogiques, nous autorisant à parler de l’architecture comme du « troisième enseignant » (Musset, 2015). Entre prescrit scolaire et expérimentation spatiale, nous souhaitons comprendre comment l’architecture scolaire, transformée par ses usagers par un environnement climatique, permet une réflexion sur les contextes d’apprentissages, notamment aux Antilles. À partir de ces questions articulant les sciences de l’éducation et l’architecture et de leur construction historique, nous souhaitons examiner les méthodes existantes et chercher collectivement les plus adaptées pour proposer une étude originale de l’architecture scolaire en milieu tropical, permettant de penser les réalités scolaires aux Antilles.
Le jeudi 1er décembre de 16h30 à 18h
« Ethnomathématique des dessins sur le sable du Nord de l’île d’Ambrym (Vanuatu, Pacifique sud) »
M. Éric VANDENDRIESSCHE
Chargé de recherche au CNRS (Section 38- Anthropologie) – SPHere, CNRS et Université Paris-cité
Résumé : L’activité communément appelée « dessins sur le sable » a été observée tout au long du 20e siècle dans différentes sociétés autochtones, et au Vanuatu (Pacifique Sud) notamment. Elle consiste à tracer une ligne continue – contrainte par un quadrillage de lignes ou de points – avec un doigt sur le sable ou la terre battue. Dans cet exposé, je commencerai par présenter le contexte de la pratique des dessins sur le sable du Nord de l’île d’Ambrym (Vanuatu), qui s’ancre dans une réalité culturelle complexe. Dans un second temps, nous verrons que l’analyse ethnomathématique de cette pratique suggère que la création des dessins sur le sable a probablement consisté en l’organisation de «motifs élémentaires» en procédures (ou algorithmes), mettant en œuvre des concepts tels que ceux de symétrie, d’itération, ou de transformation. Enfin, je montrerai comment une modélisation informatique des dessins sur le sable a permis de formuler de nouvelles questions, et d’élaborer des expérimentations proposées aux dessinateurs d’Ambrym, dans la perspective de mieux saisir les processus cognitifs en jeu dans la création de ces procédures géométriques.
Le jeudi 24 novembre de 16h30 à 18h
« L’Intelligence Artificielle en ÉDucation (AIED) : Comprendre les tuteurs intelligents et leur apport en milieu éducatif »
Mme Valérie PSYCHÉ et M. Aziz MINOUDI
Professeure à l’Université TÉLUQ et Doctorant à l’Université de Sherbrooke
Résumé : Dans le cadre de ce séminaire, la professeure Psyché présente sa vision du domaine de l’intelligence artificielle en éducation (mieux connu sous AIED pour Artificial Intelligence in EDucation). Elle aborde l’objet principal de la recherche en lien avec ce domaine bien établi depuis une cinquantaine d’années : les systèmes tutoriels intelligents ou communément appelés, tuteurs intelligents. En abordant le sujet « Comprendre les tuteurs intelligents et leur apport pour le milieu éducatif », elle présentera cet objet de recherche de façon théorique et pratique (exemples à l’appui). Puis, elle fera le lien avec le milieu de l’éducation, ce dernier ayant des préoccupations parfois éloignées de celles de la recherche, en répondant à la question de l’apport possible de la recherche en AIED pour l’écosystème éducatif particulièrement avec les tuteurs intelligents. Pour finir, elle abordera les défis et perspectives pour le système éducatif, notamment par rapport à la transformation du rôle de l’enseignant et de la formation due à l’omniprésence de plus en plus forte de l’IA dans le système éducatif.
Le mercredi 19 octobre 2022 de 16h30 à 18h
« De la didactique à la corporéité mathématique : un cheminement de recherche »
Mmes Fabienne VENANT et Valériane PASSARO
Professeures à l’Université du Québec à Montréal (UQAM), Canada
Résumé : Dans cet exposé, nous montrerons comment notre participation à une communauté de pratique somatique a influencé l’évolution de nos intérêts de recherche, de nos cadres théoriques d’analyse, ainsi que de nos pratiques de formation universitaire. Nous commencerons par présenter nos intérêts de recherche en didactique des mathématiques centrés autour des enjeux sémiotiques et de la construction dynamique du sens d’objets mathématique tel le concept de fonction (Passaro 2009; Passaro, Saboya, Venant, à venir). Nous montrerons ensuite comment la prise de conscience progressive de la corporéité (Emond, 2018) nous a emmenées à nous interroger plus en profondeur sur le rôle du corps et de l’expérience dans l’apprentissage (Dewey 1938; Varela 1993; Carlson et al., 2002; Radford et al., 2009), à nous tourner vers des cadres d’analyse prenant en compte les interactions sociales dans le processus de médiation sémiotique (Bartolini Bussi et Mariotti, 2008) ainsi qu’à mettre les mathématiques « en mouvement » dans nos expériences de formation.
ET
« La recherche qualitative au service de la formation : investiguer la place du corps »
Mmes Sabine CHATELAIN et Lisa LEFEVRE
Professeures associées à la Haute école pédagogique du canton de Vaud (HEP Vaud), Suisse
Résumé : Dans cette communication, nous allons présenter quelques approches méthodologiques mises en œuvre dans des recherches sur des pratiques des enseignants du premier et du second degré en Suisse et en France. Ces travaux documentent la manière dont la place du corps peut être analysée par des approches différentes (ethnographique, phénoménologique et phénoménographique). Nous décrivons des techniques de récolte de données (observation non participante, entretien d’autoconfrontation, entretien d’explicitation, focus group, vidéo) et des analyses qualitatives réalisées dans une étude sur l’enseignement de la musique (une recherche-action menée avec trois enseignantes sur le rôle de la corporéité dans les apprentissages rythmiques) et dans les situations de gestion de classe (module INSPE sur la présence corporelle).
Séminaires de 2021-2022
Le Jeudi 7 juillet 2022 de 16h30 à 18h
« Les humanités numériques : des outils et pratiques au service de la littératie numérique »
Résumé : Cette contribution propose de donner un aperçu des possibilités offertes par les humanités numériques dans le cadre du développement de compétences dans le champ des métiers de la médiation et de l’enseignement. Entendues comme un ensemble d’outils et de pratiques au service de la littératie numérique (Drot-Delange, 2014), nous faisons l’hypothèse que les humanités numériques peuvent soutenir le développement des aptitudes à comprendre et à utiliser les technologies numériques, favorisant ainsi l’intégration dans le village global (McLuhan, 1967). Après un rappel de définitions relatives aux humanités numériques, une sélection d’exemples de projets permettra d’illustrer de manière concrète certaines des problématiques liées à ce domaine. Dans un second temps nous verrons quelles opportunités peut offrir l’inscription dans une démarche propre aux humanités numériques en contexte didactique. A partir de ces éléments, nous nous demanderons dans quelle mesure les méthodes et pratiques relevant des humanités numériques peuvent soutenir le développement de « méta-compétences » en situation de transmission d’information à l’université de manière plus globale, en facilitant notamment le dialogue entre représentants de différentes disciplines mais aussi de différents statuts et corps de métiers.
Le Jeudi 23 juin 2022 de 14h à 15h30
« Le développement de l’image du corps chez l’enfant : analyse d’un dispositif pluricatégoriel de formation »
Résumé : La communication présentera une action de formation sur le développement de l’image du corps de l’enfant de moins de 8 ans. Cette action, en cours actuellement, associe une démarche de recherche, menée auprès d’une micro-communauté professionnelle pluri-catégorielle qui vise à diversifier les modalités pédagogiques de cette construction dans le temps scolaire pour les élèves. Elle envisage en particulier la construction de la différence entre le schéma corporel et le rôle des représentations iconoscriptuelles comme contributions à l’affinement de la construction mentale du corps.
Le Jeudi 5 mai 2022 de 16h30 à 18h
« L’observation filmée pour observer la dimension contextualisée de la contextualisation didactique en éducation à la sexualité »
Le Jeudi 7 avril 2022 de 16h30 à 18h
« Le développement de la morphosyntaxe chez le jeune enfant : apports des comparaisons entre langues et différents contextes d’acquisition »
Résumé : Dès les premières études sur l’acquisition du langage, de nombreux débats théoriques ont été soulevés quant à la nature des représentations linguistiques chez le jeune enfant, y compris sur les capacités innées d’apprentissage et le rôle de l’environnement linguistique. Des études sur l’acquisition des dépendances sujet-verbes effectuées sur des enfants monolingues et bilingues- apprenant la Langue des Signes Britannique, le créole haïtien, le français et plusieurs variétés d’anglais et d’espagnol- permettront de découvrir différentes méthodologies et de souligner l’importance des comparaisons entre langues et différents contextes d’acquisition afin comprendre les mécanismes qui sous-tendent le développement de la morphosyntaxe et contribuer des données utiles aux éducateurs et aux cliniciens.
Le Jeudi 27 janvier 2022 de 15h à 16h30
« Soutenir l’invention d’une pédagogie de l’engagement : un accompagnement au long cours de collectifs d’acteurs de l’éducation populaire »
M. Sébastien Pesce
Professeur en sciences de l’éducation à l’université d’Orléans, Membre du laboratoire ERCAE, Directeur de l’INSPE Centre-Val de Loire.
Résumé : Les centres sociaux et socioculturels travaillent depuis plusieurs années à l’invention d’une « pédagogie de l’engagement ». Cette expression désigne des pratiques pédagogiques et des modèles d’intervention auprès d’une variété de publics (enfants, adolescents, familles, militants associatifs). Mais elle réfère aussi à une démarche plus globale, articulant transformation des pratiques, des organisations et de la culture des acteurs et de l’institution (la fédération des centres sociaux de la Vienne) à l’échelle d’un territoire. La conférence rend compte de l’accompagnement mis en œuvre par trois chercheurs durant six années, à la fois auprès de la fédération départementale et de plusieurs collectifs professionnels relevant de cette fédération. Elle présente les stratégies et les méthodes mobilisées. Elle interroge plus généralement les visées et les effets des démarches d’intervention socio-clinique, et la manière dont peut être envisagée la transformation conjointe des pratiques et des dispositifs dans le champ éducatif et pédagogique.
– Monceau G. (dir.) (2017). Enquêter et intervenir. Effets de la recherche socio-clinique. Nîmes : Champ Social.
– Pesce S. et Breton H. (dirs.) (2019). Accompagnement collectif et agir coopératif : éducation, formation, intervention. Paris : Téraèdre
– Pesce S. (dir.), Doublet M.-H. et Guillet J. (2021). Vers une pédagogie de l’engagement ? Pratiques et dispositifs d’émancipation dans les centres sociaux de la Vienne. Nîmes : Champ Social.
Le Jeudi 16 décembre 2021 de 16h30 à 18h
« La colonisation a-t-elle permis l’avancée de la recherche ? Le cas de la Guadeloupe »
M. François-Max Dorville
Retraité de l’enseignement supérieur. Ancien MCF en Mathématiques à l’Université des Antilles et Directeur de l’IUFM de Guadeloupe
Résumé : Les premiers voyageurs-Naturalistes, par les observations qu’ils ramenaient de leurs périples, ont certainement attisé les curiosités et les interrogations des premiers savants. Ceux-ci, en tentant d’expliquer les différences entre les plantes, les animaux et les hommes, existant et évoluant en des lieux différents du monde ont ainsi fait avancer la science. La colonisation a été une aubaine pour beaucoup de scientifiques qui pouvaient ainsi disposer de terrain d’observations et d’expérimentation qu’ils pouvaient exploiter avec l’aval et la protection de leurs gouvernements.
Séminaires de 2020-2021
Le Jeudi 25 mars 2021 de 16h30 à 18h
« À la recherche de la langue maternelle des écoliers guadeloupéens : Élaboration d’un protocole d’investigation »
Mme Mirna Bolus
Docteur en Cultures et Langues Régionales (INSPE de Guadeloupe, CRREF)
Résumé : En Guadeloupe, la question de la langue maternelle est, au mieux sous-évaluée, au pis ignorée. Selon une tendance, le français ayant pris de plus en plus de place dans la vie des familles, il serait en train de devenir la langue maternelle des plus petits. Quant à la langue créole, ces derniers y accèderaient « naturellement », au fil du temps, au contact de leurs « quelques » camarades, dont ce serait la langue maternelle. Par ailleurs, exposée quotidiennement au monde médiatique, notamment celui des réseaux sociaux, la jeunesse se « créoliserait » via le numérique. Ainsi, ils ne sont pas rares les parents qui découvrent avec surprise que leur progéniture comprend le créole et surtout s’exprime dans la langue. Amenée à effectuer des visites dans les classes afin d’accompagner les lauréats du Concours de Recrutement de Professeur des Ecoles (CRPE), je m’interroge sur la langue pratiquée en classe. À l’école, l’élève créolophone est généralement identifié comme étant un allophone originaire, 9 fois sur 10, d’Haïti. Pourtant, lorsque le français scolaire érige une barrière entre les enseignants débutants et les élèves guadeloupéens, rendant parfois la communication et l’exécution des tâches scolaires difficiles, les premiers ont vite fait d’évoquer le statut de locuteurs créolophones des seconds. Aussi pouvons-nous dire, qu’à l’image de la situation sociolinguistique de l’ensemble du territoire, l’identification de la langue maternelle de même que le choix de la langue d’enseignement demeurent des points complexes, voire sensibles. Certes, les acteurs principaux de l’école en Guadeloupe parlent apparemment le français. Mais de quel français s’agit-il précisément ? Ce français, qui intègre le démonstratif créole « lasa » (« Cet enfant-là ça… ! ») ou échange allègrement les prépositions « à » et « dans » (« Allez mettre vos chaussures dans vos pieds ! »), ne correspond pas au standard scolaire attendu. Il est, à l’évidence, profondément guadeloupéen. Le jour où ils sont interrogés sur des formes qu’ils prononcent ou qu’ils entendent de la bouche des élèves (« Elle n’arrête pas de me malparler même et de faire des cancans sur moi. »), les étudiants du Master MEEF PE, quant à eux, semblent découvrir leur bilinguisme. Certains se questionnent même sur leur niveau de connaissance des deux langues. En Guadeloupe, enseigner uniquement en français n’aide pas les élèves. Cependant, pratiquer seulement le créole ne sera probablement pas davantage la panacée. À l’heure où les classes bilingues se multiplient, la mise en place d’un protocole de recherche mené dans les classes paraît être une piste intéressante permettant de découvrir les pratiques du français et du créole des premiers acteurs de l’école en Guadeloupe et de déterminer, dès lors, ce qui leur tient de langue maternelle. Objet indispensable à l’élaboration d’une didactique nouvelle et plus efficiente pour la formation des élèves.
Le Jeudi 18 mars 2021 de 16h30 à 18h
« Le croisement d’outils d’évaluation comme moyen de médiation formative chez les jeunes migrants scolarisés en Guadeloupe »
M. Frédéric Beaubrun
Docteur en Sciences de l’éducation (CRREF)
Résumé : Cette contribution vise à rendre compte d’une auto-observation et de l’analyse d’une pratique professionnelle expérimentale. Cette pratique a été réalisée en Guadeloupe en didactique sociolinguistique dans le cadre de l’accompagnement d’élèves allophones dans un lycée de Basse-Terre. La scolarisation de ces élèves d’origine étrangère est encadrée par le Centre Académique pour la scolarisation des élèves non-francophones nouvellement arrivés et des gens du voyage (désormais CASNAV). En étudiant les usages de certains outils d’évaluation diagnostique lors de la prise en charge des élèves, il est apparu que les supports fournis par l’institution pouvaient être remplacés ou hybridés par des supports venus d’autres dispositifs, tels ceux qui sont utilisés par l’OFII. Le nouvel outil d’évaluation peut alors resservir ultérieurement en tant que support de séance d’apprentissage et de renforcement de connaissances grammaticales ou lexicales dans l’enseignement du français langue étrangère et faciliter les interactions entre l’enseignant et l’élève, surtout si certains des items présents ont été recontextualisés. Au-delà de l’aspect formel de la pratique évaluative, la remodélisation des outils de diagnostic et leur usage à visée formative sont susceptibles, d’une part, de mobiliser le déjà-là culturel, linguistique et identitaire des élèves (Beaubrun, 2020), et d’autre part, de générer des apprentissages informels. C’est en cela que pourrait s’installer dans ce moment pédagogique une forme nouvelle de médiation co-active (Balslev et Dezutterin, 2008) au sein du triptyque savoirs-élève-enseignant, où le milieu qui entoure cette médiation est en même temps inclus et autorégulé (Laveaultin, D., 2007). Cette démarche ambitionne de mettre en exergue les « atouts » (Sánchez Iranzo, 2020) spécifiques au parcours de mobilité commun à tous les élèves allophones considérés.
Le Jeudi 25 février 2021 de 16h30 à 18h
« L’éternel bricolage. Bilan de la continuité pédagogique dans l’outremer »
M. Pierre-Olivier Weiss
Docteur en Sociologie, ATER à l’université des Antilles
Résumé : La crise planétaire qui est intervenue par effet de la pandémie de la COVID-19 a contribué à accélérer le débat sur le futur de l’éducation. Cette crise a stimulé la production scientifique de manière impressionnante en un temps record. De nombreuses études se sont consacrées à analyser les conditions de vie des individus pendant le confinement, leurs peurs, leurs frustrations, leurs stratégies alimentaires ou leur niveau de résilience, notamment. Nous avons appris que, bien que toutes les communautés humaines et toutes les catégories sociales aient été touchées par cette situation inédite, certaines (plus que d’autres) ont capturé l’attention de la société civile, des médias et des chercheurs, jusqu’à alimenter un vrai débat international. C’est le cas des étudiants, des élèves et des enseignants qui, par effet de la fermeture des établissements scolaires et d’enseignement supérieur un peu partout dans le monde, ont dû suivre pendant plusieurs mois une scolarité ou une formation à distance. Plusieurs organismes intergouvernementaux, centres de recherches et équipes de chercheurs ont suivi de près le phénomène, bien que la plupart des travaux ont été consacrés aux étudiants de l’enseignement primaire et secondaire. Entre les travaux qui s’intéressaient aux conditions d’étude des universitaires français relativement peu se sont consacrés aux outre-mer. Il s’agit d’une population tout de même particulièrement significative, qui souffre des effets de l’éloignement géographique par rapport aux centres de production du savoir ‘national’ mais aussi d’un écosystème local défaillant en termes d’infrastructures et d’offres de formation.
Dans le cadre du projet FÉCOM (Formation et Enseignement en temps de COVID-19 dans les Outre-Mer) porté par l’Observatoire Caribéen du Climat Scolaire au sein du Centre de Recherches et de Ressources en Éducation et Formation (CRREF), nous menons actuellement une recherche sur le vécu, les perceptions, les attitudes et le bien-être en contexte épidémique des étudiants, élèves et enseignants du primaire et du secondaire de l’outre-mer. Ce projet s’est penché sur quatre territoires ultrapériphériques de l’État françaisen particulier : Guadeloupe, Martinique, Nouvelle-Calédonie et Polynésie française.
Dans ce contexte de crise, nous avons réalisé un focus sur les conditions de confinement et les stratégies qui ont été adoptées pour faire face à la situation avec une approche structurelle. À travers une enquête en ligne diffusée lors du confinement du printemps 2020, nous avons interrogé plusieurs aspects en rapport au travail et aux études tels que la disponibilité de matériel informatique et l’accès à Internet, l’aménagement de l’espace privatif, la configuration du ménage, le lien pédagogique, le bien-être et le sentiment d’insécurité. Ce séminaire sera l’occasion pour nous de restituer les premiers résultats de ce projet encore en cours et de faire un bilan intermédiaire que nous soumettrons au débat.
Le Jeudi 26 novembre 2020 de 13h à 14h30
« Le corps au coeur de l’apprentissage grâce au numérique – Exploration d’un nouveau paradigme pour l’éducation à la petite enfance »
Mme Marion Voillot
Doctorante à l’IRCAM-STMS du CRI Paris et du CRD ENS/ENSCI
Résumé : Dans une démarche entre Science & Design, ce projet de recherche se situe au croisement des IHM (Interactions Humain-Machine) et de l’éducation. Il propose de repenser l’éducation au numérique pour la petite enfance, en plaçant le corps en tant que médium d’interaction avec la technologie. En effet, la création d’interfaces tangibles et numériques (sans écran) permet de favoriser une interaction incarnée (ou embodied interaction) grâce au développement d’interactions multimodales, c’est-à-dire mobilisant à la fois les sens (ouïe, vue, toucher) et le mouvement. Co-conçus avec les professionnel.le.s de la petite enfance, ces interfaces sont inclues dans des scénarios pédagogiques testés en école maternelle. Lors de ce séminaire, nous vous présenterons 3 scénarios d’interaction tangible :
- CoMo.education, une application permettant de raconter des histoires sonores en mouvement grâce au couplage geste-son développé sur smartphone (en collaboration avec l’équipe Interaction Son Musique Mouvement de l’IRCAM-STMS).
- Learning Matters, des dispositifs en textile électronique permettant d’appréhender les systèmes de traitement de l’information — energie, information, signal — grâce à la manipulation et un l’assemblage de circuits interactifs (en collaboration avec Claire Eliot, designer e-textile).
- Et enfin, l’egloo, un espace numérique et tangible pour les jeunes enfants, laboratoire mobile et espace expérientiel d’interaction tangible (en collaboration avec l’équipe Premiers Cris et OVAOM).
Ces scénarios, pédagogiques et numériques, sont les supports de l’exploration active de l’enfant permise par la manipulation, le jeu et l’apprentissage autonome. Conçus comme des démonstrateurs de littératie numérique, ils sont également vecteurs des compétences dites du 21ème siècle que sont la collaboration, la créativité et l’esprit critique.
Séminaires de 2019-2020
Le Jeudi 12 décembre 2019 de 16h30 à 18h à l’ESPE de Guadeloupe (Salle A101)
« Projet d’enseignement : une poïétique du professeur. Interstice entre contexte et séquence d’apprentissage »
Mme Minakshi Carien
Docteur en Arts, Esthétiques, Pratique et Théories
Résumé : Comment créer son projet d’enseignement dans l’interstice de langage et pratiques artistiques, d’éducation multiculturelle, d’interdisciplinarité et d’engagement ? L’enjeu de cette communication porte sur la construction des séquences d’apprentissage dans une logique curriculaire et spiralaire. Cette communication met en exergue l’analyse d’un projet d’enseignement en Arts Plastiques cycle 3 et 4. Ce projet n’est en aucun cas modélisant, mais il prend pour pierre angulaire le concept de contexte. Pour P. Blanchet, « le contexte doit être pensé comme une construction et non comme une donnée ». Notre hypothèse est que si le contexte signifie « assemblage » alors le professeur d’arts plastiques a la possibilité de le penser, de le « (re) situer », de le restituer aux sein de son projet d’enseignement. Ce dernier peut être esquissé comme une œuvre, comme faire œuvre, de devenir une poïétique du professeur, dont la prise en compte du contexte peut devenir un interstice du projet d’enseignement.
Le Jeudi 24 octobre 2019 de 16h30 à 18h à l’ESPE de Guadeloupe (Salle A207)
« Modélisation mathématiques d’un problème d’absorption de nutriments des plantes en agroécologie »
Loïc Louison
MCF en Mathématiques
Résumé : Dans l’agriculture, l’utilisation massive des produits phytosanitaires et autres pesticides au bénéfice de la rentabilité, a entraîné une pollution durable des terres agricoles. Nos régions ultrapériphériques ont été contaminées durablement par le pesticide chlordécone. Afin de remédier à ce problème, le développement d’une agriculture alternative plus respectueuse de l’environnement était primordial : l’utilisation des cultures associées est encouragée depuis quelques années. Les agro-écologistes étudient ces solutions et mènent des expériences concluantes. Nous nous intéressons dans cet exposé à la modélisation mathématique du problème et présentons les résultats obtenus.
Séminaires de 2018-2019
Le Jeudi 6 juin 2019 de 16h30 à 18h à l’ESPE de Guadeloupe (Salle A207)
« Le travail des responsables d’établissement dans une perspective de développement organisationnel »
Frédéric Yvon
Professeur associé à l’Université de Genève (Suisse)
Résumé : Dans la plupart des systèmes éducatifs occidentaux, les réformes en vue d’améliorer la qualité de l’éducation et de la formation, se multiplient et les changements se succèdent. Dans ces conditions, les contextes et les situations éducatifs deviennent de plus en plus complexes, les exigences accrues et les contraintes nombreuses. Ceci affecte le pilotage et la gestion des organisations éducatives et mène à la redéfinition des rôles du personnel d’encadrement des équipes de formation. Il est principalement attendu d’eux qu’ils assument une double expertise en leadership, à la fois celle d’un « leadership managérial » mais aussi d’un « leadership pédagogique ». En d’autres termes, il s’agit de pouvoir gérer et articuler une multitude de tâches d’ordre administratif et éducatif face à des collectifs mais aussi à des individualités. Or, des travaux et des observations du travail réel des dirigeants en éducation montrent qu’ils rencontrent des obstacles sur ce plan, lesquels limitent leurs actions. Ainsi, certains ont des difficultés à gérer l’interface managérial/pédagogique, d’autres à co-piloter, c’est-à-dire à distribuer (déléguer) les tâches et d’autres encore semblent s’interroger sur l’impact des actions sur les équipes pédagogiques et les apprenants surtout quand ils se retrouvent face à des prescrits flous ou contradictoires.
Le Lundi 29 avril 2019 de 16h à 18h à l’ESPE de Guadeloupe (Amphithéâtre)
« Exploitation de livres bilingues et plurilingues pour favoriser l’entrée dans l’écrit en contexte de diversité linguistique »
Françoise Armand
Professeur à la faculté des sciences de l’Éducation de l’Université de Montréal (Canada)
Résumé : Plusieurs recherches ont permis de souligner l’importance des partenariats entre l’école, la famille et la communauté pour soutenir la réussite scolaire des enfants, de même que des enjeux spécifiques aux familles immigrantes à cet égard. Dans les milieux scolaires marqués par l’immigration et la diversité linguistique, les parents peuvent parfois être considérés comme « inaptes » à soutenir leurs enfants, surtout lorsqu’ils ne parlent pas la langue de l’école. Pourtant, les parents issus de l’immigration possèdent un fonds de connaissances, soit des ressources dont font partie les différentes langues familiales, qui gagnent à être mises à profit dans la scolarisation de leur enfant. En milieu scolaire, la collaboration avec les parents pour l’utilisation ou la création de livres bilingues, un support écrit qui permet de favoriser des approches de complémentarité entre langues familiales et langue de scolarisation, apparaît comme une approche intéressante à mettre de l’avant pour rapprocher l’école et la famille, pour favoriser les apprentissages en lien avec la littératie et pour favoriser l’engagement scolaire chez les enfants. Dans cette conférence, nous présenterons, après un exposé théorique, des exemples de projets (à partir d’extraits vidéo) dans lesquels des livres bilingues et plurilingues ont été exploités auprès d’enfants du préscolaire dans une perspective de collaborations école-famille. Des observations ont permis de constater une participation accrue des familles à ces projets ainsi qu’un enthousiasme et un engagement de la part des enfants, ce que des propos recueillis auprès de parents et d’enseignants ont permis de confirmer.
Le Jeudi 11 avril 2019 de 16h30 à 18h à l’ESPE de Guadeloupe (Salle E4)
« Perception d’erreurs de raisonnement d’étudiants par leur enseignants… »
Olivier Lefebvre
Agrégé de Physique, Docteur en didactique de la Physique
Résumé : Dans la communauté des didacticiens de la physique, le fait de connaître les raisonnements communs est indispensable pour envisager un enseignement de cette discipline. Ces raisonnements communs sont nombreux en physique car les « apprenants » n’ont pas attendu d’avoir un enseignement pour se construire une représentation du monde qui les entoure. L’auteur se propose d’interroger la « qualité » de la perception de ces raisonnements communs par les enseignants et de situer celle-ci dans un modèle dit de l’œil attristé d’un physicien. Ce dernier, en cours de construction, replace la perception des raisonnements communs au sein de modèles existants : triangle pédagogique, triangle didactique et transposition didactique et les facteurs de contexte externe et interne. À l’interface entre pédagogie et didactique, la présentation partira d’un exemple en physique et tentera de montrer une nécessaire prise en compte d’un savoir pédagogique disciplinaire dans la formation des enseignants.
Le Jeudi 14 février 2019 de 16h30 à 18h à l’ESPE de Guadeloupe (Salle E4)
« Assimilation et transmission culturelle à l’école »
Rémadjie N’Garone
Docteur en ethnologie
Résumé : L’École, en tant qu’institution éducative, transmet des savoirs, des savoir-faire, des savoir-être, des normes, des valeurs, etc., en somme, des éléments culturels. Le contexte guadeloupéen est marqué par un processus d’assimilation culturelle à la France. Cette communication a pour objectif de s’interroger sur les enjeux sociaux et culturels de l’École dans ce contexte. L’École républicaine française transmet et valorise essentiellement les traits d’une culture extérieure, ce qui produit des conséquences sociales, culturelles et identitaires. Enseignants et formateurs sont alors confrontés à la problématique du détour. Ils aménagent, adaptent les enseignements pour donner du sens à ce qu’ils transmettent et favoriser l’ancrage des apprenants dans leur société guadeloupéenne et française. À travers une analyse menée dans le cadre de ma recherche doctorale, nous interrogerons les paradigmes qui modèlent cette institution, certaines conséquences de ce modèle, et les façons dont les acteurs composent pour faire lien entre l’École et la société dans laquelle elle œuvre.
Le Jeudi 7 février 2019 de 16h30 à 18h à l’ESPE de Guadeloupe (Salle E4)
« Critères d’identification de pratiques gagnantes en enseignement des sciences et technologies au primaire : résultats d’une démarche dans deux provinces canadiennes »
Mme Liliane Dionne Ph.D.
Professeur à la Faculté d’éducation de l’Université d’Ottawa (Canada)
Résumé : Cette communication se concentre sur certains résultats d’un projet de recherche de quatre ans financé par le Conseil de recherches en sciences humaines du Canada (CRSH, 2013-2017) portant sur les pratiques gagnantes en sciences et technologies au primaire. Notre objectif visait à identifier, caractériser et sélectionner des exemples de pratique chez ces enseignants en utilisant une méthodologie qualitative/interprétative. Pour ce faire, un travail de terrain a été réalisé de 2014 à 2017 avec deux communautés d’apprentissage formées d’enseignants de l’Ontario et du Québec. Ces enseignants enseignent à des élèves dont l’âge est compris entre 9 et 12 ans. Les résultats recueillis permettent une meilleure compréhension des exemples de pratiques à la lumière de neuf critères d’identification. Ces pratiques gagnantes sont rassemblées dans un site Web : le TableauST.ca. Ces critères ont été définis par un processus de triangulation entre les pratiques des enseignants, les programmes ministériels et les résultats de recherches en didactique des sciences. Ces critères sont : le contenu stimulant, la démarche d’investigation, le questionnement, le partage et la confrontation de preuves, l’apprentissage actif, les représentations multimodales, l’enrichissement conceptuel, l’évaluation pour l’apprentissage et les ressources du milieu. Une analyse plus approfondie de ces critères a permis de mieux comprendre leur prévalence, leur ordre d’importance, leurs relations, et les divergences qui ont émergé des pratiques des deux groupes d’enseignants dans chaque province. Par exemple, au niveau de la prévalence, mentionnons l’apprentissage actif et l’enrichissement conceptuel qui figurent comme critère récurrent pour l’ensemble des pratiques gagnantes. Parmi les divergences, la démarche d’investigation privilégiée dans les pratiques correspondrait davantage à la résolution de problèmes technologiques chez les enseignants québécois, tandis que les collègues ontariens optent pour une plus grande diversité de démarches. Le contenu stimulant serait le critère numéro un en Ontario, contrairement au Québec où le questionnement serait vu comme prépondérant. Les raisons de ces prévalences, importances, relations et divergences apparaissent multiples. D’abord imputables à des programmes ministériels différents, ces caractéristiques seraient vraisemblablement dues à des pratiques spécifiques à chaque province. En résumé, une présentation d’ensemble des critères d’identification des pratiques gagnantes en sciences et technologies mis en exergue au cours de cette recherche sera effectuée, tout en mettant un accent sur leurs caractéristiques et spécificités.
Le Jeudi 17 janvier 2019 de 16h30 à 18h à l’ESPE de Guadeloupe (Salle E4)
« La didactique clinique : un nouveau cadre théorique pour analyser les pratiques d’enseignement et de formation »
M. Denis Loizon
MCF en STAPS à l’université de Bourgogne
Résumé : La didactique clinique est un cadre théorique relativement nouveau qui articule de manière originale des concepts de la didactique avec ceux de la clinique psychanalytique. Trois postulats au cœur de ce cadre : le sujet est singulier, assujetti et divisé. Le cadre est organisé autour de trois temps centraux : le déjà-là, l’épreuve et l’après-coup. Ces trois temps se retrouvent dans la méthodologie qui repose essentiellement sur des études de cas :
- l’entretien de déjà-là ;
- l’entretien ante séance ;
- l’épreuve d’enseignement (ou de formation) qui représente la confrontation au réel (observation vidéo)
- l’entretien post séance
- l’entretien d’après-coup.
Les verbatim sont analysés à partir des concepts majeurs du cadre théorique : le déjà-là, l’épreuve, l’impossible à supporter, la Référence, le Savoir, le sujet supposé savoir.
Après des observations centrées surtout sur l’enseignement ses sports de combat, puis des séances d’E.P.S., les analyses se réalisent sur de multiples objets comme le déjà sensoriel (analyse de l’enseignement d’un professeur sommelier), le rapport à l’écrit des élèves, l’éducation à la santé, la relation tuteur-stagiaire…
Le Jeudi 13 décembre 2018 de 16h30 à 18h à l’ESPE de Guadeloupe (Salle E4)
« L’éthique dans le champ de la didactique des Questions socialement vives »
Mme Nathalie Panissal
Professeure des universités en Sciences de l’Éducation
Résumé : Certaines rationalités morales construites tout au long de la modernité ne sont plus opérationnelles pour traiter les dilemmes moraux et défis contemporains inhérents aux technosciences comme l’augmentation des capacités humaines, l’intelligence artificielle, la nanosanté, par exemple. De nouvelles vulnérabilités invitent le citoyen à créer de nouveaux instruments de pensée. L’éducation est ainsi mise en demeure de contribuer au développement de compétences permettant d’assurer la soutenabilité et la pérennité de la société humaine et plus largement du monde. Elle doit désormais faire sienne la perspective de transformer notre monde en assurant sa transition vers la viabilité. Dans ce contexte, les « sociétés démocratiques ont plus que jamais besoin d’une certaine forme de religio afin d’éviter la dérive vers le chaos et la tyrannie », cette fonction est désormais assumée par l’éthique. La capacitation éthique devient donc un défi à révéler pour armer nos sociétés contemporaines à penser les nouveaux enjeux. L’école doit se donner pour objectif de permettre aux jeunes de réfléchir de manière autonome, responsable et critique sur leurs expériences de vie et sur la société qui les façonne.
Le Jeudi 15 novembre 2018 de 16h30 à 18h à l’ESPE de Guadeloupe (Salle E4)
« Ethnographier les terrains minés : l’apport de l’observation systématique de type éthologique aux sciences de l’éducation. Présentation des résultats d’une enquête comparative en Guyane et Polynésie française »
M. Maurizio Ali
MCF en Sciences de l’Éducation à l’Université des Antilles
Résumé : L’objectif de cette présentation est celui d’exposer les résultats d’une enquête anthropologique visant la description des pratiques éducatives informelles chez deux communautés autochtones de l’Outre-mer français : les Wayana-Apalaï, en Guyane, et les Enata, en Polynésie française. À partir des données recueillies grâce à un travail ethnographique de longue durée basé sur un protocole d’observation systématique de type éthologique (une méthodologie peu utilisée dans le domaine des sciences de l’Éducation), on a pu déterminer le temps consacré aux interactions éducatives dans le milieu domestique, les styles éducatifs dominants et les logiques éducatives des membres des deux communautés. Les résultats obtenus montrent que les stratégies éducatives des Wayana-Apalaï et des Enata sont modelées par les contraintes propres à la dynamique postcoloniale et des impératifs imposés par l’économie de marché. Finalement, la dernière partie de la présentation est dédiée au développement d’une réflexion méthodologique concernant le travail ethnographique dans les sciences de l’Éducation et les questionnements éthiques qui surgissent quand le terrain d’étude devient pénible ou, pire, « désagréable ».
Le lundi 22 octobre 2018 de 17h à 19h à l’amphithéâtre de l’ESPE de Guadeloupe
« La médiation scolaire, proposition d’une modélisation du concept. Le cas de la minorité ROM en Europe »
Mme Aurora Ailincai
Docteur en Sciences de l’Éducation
Résumé : Nous nous proposons, dans un premier temps, de faire une brève présentation du concept de médiation dans sa dimension historique et sa déclinaison selon les contextes. Dans un second temps, nous allons nous intéresser au concept de médiation scolaire en s’appuyant sur une étude de cas, la minorité rom en Europe. Pour finir, nous allons présenter une modélisation de ces concepts – médiation, médiation scolaire et médiation scolaire rom – en s’appuyant, d’une part, sur les cadres théoriques y référant et, d’autre part, sur une étude empirique menée dans la cadre d’une thèse doctorale. En termes de méthode, pour placer la médiation scolaire pour les Roms dans le cadre plus large du métier de médiateur, nous avons conduit une recherche de terrain auprès des médiateurs scolaires, directeurs d’écoles et parents des enfants qui bénéficient du soutien du médiateur scolaire. Nous nous sommes appuyés sur le modèle écologique de Bronfenbrenner qui nous a servi à la fois de cadre analytique et de socle théorique et a été utilisé dans le but de structurer les facteurs expliquant les différences et les similarités avec d’autres types de médiation. Les attributs individuels et les particularités environnementales (le microsystème) auraient le pouvoir d’influencer les résultats du travail du médiateur et d’activer ou de freiner une transformation relationnelle et situationnelle là où la médiation a lieu – les réponses aux questionnaires, les entretiens et les analyses des rapports d’activités des médiateurs témoignent de cette complexité. La modélisation proposée a été construite à partir d’un cadre d’analyse original, autour de la notion de « médiation pendulaire adaptative », qui s’explique à travers les mouvements internes et externes du médiateur selon les interactions qu’il a avec les acteurs de son environnement.
Séminaires de 2017-2018
Le mercredi 7 mars 2018 de 16h30 à 18h00
« Analyse de l’activité collaborative, épistémique et instrumentée : panorama de recherches »
Françoise Détienne et Michael Baker
Directeurs de recherche au C.N.R.S.
Résumé : Nous présenterons un ensemble de recherches réalisées au sein du groupe psychologie ergonomique du département SES de Telecom ParisTech, sur l’analyse de l’activité collaborative, épistémique et instrumentée. Il s’agit d’analyser des situations qui impliquent des processus de co-élaboration de connaissances nouvelles, concrétisées sous la forme de « knowledge objects » (designs, textes, objets innovants, …), souvent grâce aux outils Internet, dans le cadre du travail et des institutions de formation. L’activité collaborative — la dynamique interactive, les formes de participation — est appréhendée dans ses différentes dimensions (cognitive-linguistique, affective, interculturelle, …). Les quatre recherches suivantes seront discutées : (1) l’analyse et l’évaluation de la qualité de la collaboration ; (2) l’analyse des rôles interactifs dans les discussions sous-jacentes à l’écriture d’articles Wikipédia ; (3) l’analyse du rôle de l’argumentation dans la créativité collective ; et (4) l’analyse de la circulation interactive de l’affect. En guise de conclusion, après avoir présenté nos perspectives de recherche, nous discuterons dans ce cadre d’un projet ANR franco-québécois en cours (TEEC).
Le jeudi 15 février 2018 de 16h30 à 18h00
« Enseignement spécialisé : des pratiques professionnelles soumises à des contraintes et libertés peu explicites »
Greta Pelgrims
Professeur associé à l’Université de Genève
Résumé : Les systèmes scolaires ont en commun d’assigner à l’enseignant spécialisé la fonction d’enseigner des savoirs désignés à des élèves déclarés par l’institution comme présentant des besoins éducatifs particuliers en raison, notamment, d’une difficulté, d’un trouble, d’une déficience. Avec les politiques scolaires préconisant l’école inclusive, c’est aussi à l’enseignant spécialisé que revient la fonction de soutenir l’intégration d’élèves en classe ordinaire. Car les discours admettent trop communément que l’expertise principale de l’enseignant spécialisé réside dans la prise en charge individualisée d’un élève et de ses difficultés, et dans la mise en place de conditions d’accessibilité spécifiquement propices à ses apprentissages scolaires. Pourtant, un ensemble d’observations et de narrations de pratiques d’enseignement spécialisé montrent combien l’activité en classe peut s’écarter des intentions didactiques et pédagogiques des enseignants spécialisés. Partant d’une approche consistant à comprendre l’activité des enseignants au regard du contexte et des situations dans lesquels elle se déploie, cette conférence contribuera à souligner combien les conditions d’exercice de la profession au fil du quotidien sont caractérisées par des contraintes et des libertés d’action bien particulières, qui concernent peu la « difficulté » de l’élève, et qui sont insuffisamment explicitées et considérées. Ces contraintes tout comme ces libertés se traduisent par des dilemmes professionnels et peuvent affecter la mise en place, pour les enfants et adolescents déclarés à besoins éducatifs particuliers, de conditions d’accessibilité au rôle d’élève et aux savoirs.
Le jeudi 30 novembre 2017 de 16h30 à 18h00
« Le numérique en situation éducative : regards sur la pluralité des usages pédagogiques »
Alain Stockless
Professeur au département de didactique de l’Université du Québec à Montréal (UQAM)
Résumé : Les usages du numérique en éducation sont parfois vus comme un objet innovant, comme un incubateur de changement, comme un instrument de transformation ou même de disruption. Mais qu’en est-il exactement? La transversalité du numérique entraine des usages polysémiques et complexes qui donnent lieu également à des représentations variées. Au-delà des possibilités et du potentiel du numérique en situation éducative, nous nous sommes intéressés aux compétences numériques des enseignants et des usages pédagogiques qui en découlent. Cette présentation vise à mettre en perspective cinq années de recherche sur le développement des compétences numériques chez les enseignants quant aux usages pédagogiques effectifs avec le numérique et à la mise en œuvre de projets pédagogiques. Hormis les compétences numériques de base qui sont essentielles (Enochsson et Rizza, 2009), la question d’une transférabilité pérenne demeure un défi pour les enseignants (Koehler et Mishra, 2009).
Séminaires de 2016-2017
Le jeudi 04 mai 2017 de 16h30 à 18h00
« La place de la personne dans l’apprendre »
André Giordan
Professeur à l’Université de Genève
Résumé : La personne qu’est l’élève est toujours un tabou à l’école. Certes le dernier socle de connaissances, de compétences et de culture l’évoque. Toutefois, toujours centrée sur les connaissances, l’institution scolaire suppose que le développement de l’individu est une retombée automatique de l’enseignement. Pourtant le véritable moteur de l’apprendre vient de l’intérieur de chaque élève : curiosité, désir d’apprendre, motivation, confiance en soi et estime de soi s’avèrent incontournables. Comment repérer ces paramètres ? Surtout comment les travailler en classe ? Comment les prendre en compte en formation ?
Le jeudi 06 avril 2017 de 16h30 à 18h00
« Didactique, genre et non verbal »
Martine Vinson
Docteur en Sciences de l’éducation
Résumé : Ce travail s’articule autour de deux temps. Le premier s’inscrit dans la perspective de la co-construction du genre au fil des interactions didactiques, selon une approche ascendante des phénomènes transpositifs, seule à même à rendre intelligibles les manières dont, de façon ténue, se structurent les inégalités en classe d’éducation physique. Cette recherche a initié un désir de participer à l’évolution des représentations selon et à propos du genre en allant jusqu’à la mise en évidence d’un impensable du genre. Puis un deuxième temps qui propose deux perspectives de recherche que je mène actuellement : des pistes en didactique comparée qui étudie les dimensions génériques et spécifiques de l’enseignement et de l’apprentissage de deux activités physiques, le badminton et la gymnastique, à partir de pratiques déterminées par des enjeux de savoirs et la question du « positionnement de genre ». Ce concept rend compte des dynamiques singulières des élèves de sexes différents dans l’action didactique conjointe.
Le jeudi 30 mars 2017 de 16h30 à 18h00
« La résilience dans le domaine éducatif et scolaire »
Claire-Emannuelle Laguerre
Enseignante-chercheure associée en psychologie clinique et psychopathologie
Résumé : Après avoir mené une étude mettant en évidence que l’attitude des parents ainsi que les habitudes familiales jouaient un rôle dans la survenue d’une consommation de cannabis et entravaient l’acquisition de l’autonomie de l’adolescent, la question sur le fait que d’autres adolescents n’usaient pas de substances s’est posée. Le concept de la résilience a semblé alors le plus pertinent pour apporter un éclairage sur les capacités d’un individu à faire face aux carences parentales. Dans cette perspective, des analyses, à la fois de l’aspect motivationnel de l’individu de l’aspect relatif au capital humain et au capital social ont été menées. Elles ont permis d’éclairer les processus permettant à un individu de modifier son comportement en redéfinissant ses propres schémas affectifs et cognitifs. Aujourd’hui, nous savons que ces mêmes mécanismes peuvent être initiés par des étais extra-familiaux. Bien que les premiers tuteurs de résilience se trouvent au sein de la famille, nombre d’individus deviennent des tuteurs sans s’en rendre compte, ignorant le rôle fondamental qu’ils jouent dans la trajectoire de vie de l’individu en souffrance. C’est ainsi que les enseignants ou les éducateurs peuvent constituer des pôles d’étayage en aidant l’enfant à surmonter ses difficultés soit directement en l’encourageant, soit de manière symbolique en tant que support identificatoire. Certains travaux sur la résilience ont montré que le milieu scolaire ainsi que l’insertion sociale étaient des éléments de réussite dans le dépassement de l’adversité. C’est ainsi que, malgré des conditions de vie aversives, certains enfants se développent grâce leur investissement scolaire. Sans transposer les tâches et missions de l’enseignant qui restent éducatives et non thérapeutiques, l’objectif de cette présentation est de mieux comprendre le concept de résilience afin d’envisager un dispositif de recherche en milieu scolaire relatif à la mise en place de programmes d’accompagnement de la résilience à destination des enseignants visant à développer les ressources et les compétences des élèves, à l’instar de ceux existants au Québec.
Le jeudi 9 mars 2017 de 16h30 à 18h00
« Des idéologies linguistiques aux pratiques en salle de classe. Enseigner en milieu pluriethnique et plurilingue au Québec »
Françoise Armand
Professeure de didactique, Université de Montréal
Résumé : Dans le cadre de cette communication nous présenterons un cadre conceptuel qui permet de situer quatre types d’idéologies linguistiques (du multilinguisme ségrégationniste… au plurilinguisme) autour d’un noyau central, l’ethnocentrisme linguistique. Nous préciserons ensuite comment chacune de ces idéologies oriente les systèmes éducatifs, les politiques linguistiques scolaires et les pratiques de classe. Nous exposerons enfin des exemples de pratiques novatrices, mises en œuvre dans les écoles francophones québécoises et visant l’enseignement de l’oral, de la lecture et de l’écriture en milieu pluriethnique et plurilingue.
Le jeudi 16 février 2017 de 16h30 à 18h00
« Les littératures africaine et caribéenne dans la pratique pédagogique : pourquoi et comment ? »
Ena Eluther
Docteure en Lettres, Professeure certifiée de créole
Résumé : L’école en Guadeloupe, comme dans d’autres territoires anciennement et nouvellement colonisés, est une pâle copie de l’enseignement dispensé en France. En ce sens est-elle vecteur d’acculturation, marginalisant sans cesse la vision du monde de l’apprenant guadeloupéen. Les combats et les tentatives d’adaptation de l’enseignement à la réalité locale n’effacent pas le statut marginal de la culture et de l’expérience guadeloupéennes dans les apprentissages. Pourquoi et comment les littératures africaines et caribéennes placées au cœur de l’enseignement – des disciplines littéraires tout au moins – pourraient combattre cette marginalisation du sujet guadeloupéen ? Comment allier contraintes du programme officiel français et adaptations à la réalité guadeloupéenne et caribéenne ? Comment l’apprenant guadeloupéen reçoit-il ce changement d’angle de vue ?
Le jeudi 12 janvier 2017 de 16h30 à 18h00
« Hip-hop, africanité, créolité : les représentations identitaires multiples des jeunes Guadeloupéens de Pointe-à-Pitre »
Charlotte Guerlotté
Master en anthropologie Université de Montréal
Résumé : La Guadeloupe s’est construite avec la colonisation européenne à partir de la traite négrière, aux dépens de populations africaines en très grand nombre, et de multiples vagues de travailleurs migrants (Indiens, Syriens, etc.) ainsi que par l’extermination des premiers habitants de l’île. Si ces éléments historiques sont majoritairement acceptés, les conceptualisations des dynamiques identitaires et ethniques de la population guadeloupéenne sont quant à elles très polémiques. Certains auteurs conçoivent cette population comme une construction identitaire mixte, la créolisation, en rupture avec « l’ancien monde » (Glissant, 1997, Bonniol, 2006, etc.), tandis que d’autres la conceptualisent par une notion plus essentialiste, l’afrocentricité, en continuité avec l’Afrique, où l’aliénation des anciens empires coloniaux est dénoncée (Asante, 2007 ; Mazama, 1997). Aujourd’hui, dans un contexte de globalisation, la question que nous nous sommes posée dans le cadre de notre Master à l’Université de Montréal, est de savoir comment les jeunes Guadeloupéens urbains se représentent-ils leurs identités : participent-ils à ce débat idéologique et identitaire ? L’étude analyse treize entretiens semi-dirigés de jeunes d’une vingtaine d’années, résidant à Pointe-à-Pitre et ses périphéries urbaines et majoritairement issus de la culture hip-hop, ainsi qu’une série d’observations participantes réalisées dans les studios d’enregistrement de certains répondants (juin-août 2014). À travers leurs discours, l’ethnicité guadeloupéenne est représentée de manière extrêmement diversifiée. Leurs représentations ethniques varient entre une vision pluriethnique et parfois mixte, à une vision d’ascendance africaine. Certains jeunes mettent en avant leur africanité et d’autres s’en éloignent en s’identifiant à des ancêtres esclaves ou à une mixité ethnique. Toutefois, les représentations créoles ou afrocentriques, à proprement parler, sont rares. La culture hip-hop a également une place importante dans leurs représentations identitaires. Finalement, il n’est pas possible de faire ressortir une tendance générale de la représentation ethnique et identitaire guadeloupéenne dans leurs discours. Cette étude démontre l’intérêt de mettre en valeur la diversité des représentations identitaires et l’importance de considérer les discours identitaires individuels plutôt que collectifs. La rareté des identifications afrocentriques ou créoles dans le discours de ces jeunes peut être expliquée, en partie, par le manque de considération, de ces notions, de la diversité ethnique et identitaire à l’échelle individuelle.
Le jeudi 15 décembre 2016 de 16h30 à 18h00
« Le FLI en Guadeloupe : enjeux, réalités et perspectives didactiques en contexte »
Frédéric Beaubrun
Doctorant à l’Université des Antilles, CRREF
Résumé : Depuis 2011, la loi française a renforcé sa politique linguistique par la mise en place du français langue d’intégration (désormais FLI). Ce dispositif qui complète le précédent français langue étrangère (désormais FLE) y a ajouté un important volet relatif aux valeurs de la République. Il s’adresse aux migrants dans le cadre de l’obtention de leur titre de séjour et concerne les individus nécessitant un renforcement d’apprentissage de la langue française identifiés par l’office français de l’immigration et de l’intégration (désormais OFII). L’organisation et la mise en œuvre des séances d’enseignement du FLI sont confiées à un organisme privé habilité par le centre international d’études pédagogiques (désormais CIEP) qui soutien et contrôle ses activités. Ce séminaire présente les résultats d’une expérimentation pédagogique qui se situe en marge du système habituel FLI lors d’une formation intitulée « Parle-moi de toi, des contes créoles aux fables de La Fontaine ». Elle a duré six mois de juillet à décembre 2016 avec un public volontaire de quinze apprenants migrants caribéens. La méthodologie utilisée pour réaliser cette note croise l’analyse de fiches pédagogiques des enseignants, de productions des apprenants, de traces laissées au tableau et de retranscriptions d’interactions. Les séances sont présentées sous l’appellation voisine de français langue de régulation (désormais FLR). Leur dynamique obéit à une méthode qui vise à réguler le déjà-là linguistique et culturel des apprenants. Dans cette présentation, nous cherchons à comprendre en quoi une posture de formateur à l’écoute de la biographie des apprenants permet d’identifier des habiletés et des compétences langagières particulières déjà incorporées dans le déclaratif. Nous observons notamment les séances d’évocation par les apprenants d’épisodes de leur histoire de vie liés à leur statut de migrants. Des pistes de réflexion didactique prenant en compte les idiosyncrasies et la réassurance des apprenants sont ensuite discutées.
Le jeudi 8 décembre 2017 de 16h30 à 18h00
« Le projet PROFECIA : programme de formation ouverte, mutualisée et en ligne en écotoxicologie aquatique »
Lise Parent
Professeur de sciences à l’Université Téluq, Québec
Résumé : Le réseau international de recherche EcoBIM a été initié en 2001 par des chercheurs québécois et français qui partageaient des projets de recherche en écotoxicologique aquatique. Alors que quelques chercheurs de plusieurs pays d’Europe, d’Afrique et des Amériques participaient aux rencontres annuelles, il est apparu important de mettre en commun leurs enseignements pour favoriser le transfert international des connaissances, harmoniser les approches et méthodes, valoriser les résultats de leurs recherches et suppléer à des enseignements parfois absents. Il a été proposé de créer un programme deformation qui comprendrait des modules crédités constitués de ressources numériques pédagogiques offertes en ligne, ainsi que des ateliers méthodologiques d’harmonisation offerts en présentiel lors de des réunions annuelles d’ÉcoBim. Ce programme de formation qui serait offert au niveau master, maîtrise, doctorat, et en formations initiale ou continue constituerait le Faire-Savoir du Savoir-Faire scientifique des chercheurs d’ÉcoBIM. Le présent projet de partenariat stratégique en matière d’enseignement vise la conception d’outils éducatifs en écotoxicologie aquatique. Le projet, ses objectifs et sa mise en œuvre seront présentés. Les difficultés liées au contexte de la recherche et de l’enseignement seront discutées.
Séminaires de 2015-2016
Le jeudi 23 juin 2016 de 16h30 à 18h00
« Pour une approche sociolinguistique de Saint-Martin : enjeux et perspectives »
Résumé : La société saint-martinoise s’est construite au regard d’un flux de migrations permanentes. L’émigration au même titre que l’immigration constituent le socle même d’un parler vernaculaire particulièrement plastique qui emprunte autant à l’espagnol, au papamientu, qu’à l’ensemble des variétés de créole français attestables dans le territoire. Le parler saint-martinois ou Creole English, gagnerait non seulement à être reconnu autant que les autres variétés de créole (guadeloupéen et martiniquais), qu’à être enseigné dès le cycle 1 pour renforcer notamment les apprentissages de la langue principale d’enseignement, le français.
Le jeudi 19 mai 2016 de 16h30 à 18h00
« Bâtir le langage »
Résumé : Face à la réalité sociolinguistique diversifiée des classes, la stratégie d’enseignement du français adoptée par l’école aboutit à l’installation et à la perpétuation des difficultés d’apprentissage. Le dispositif « Bâtir le langage », conçu par A. Dorville, J. La Plaine et M.-C. Tondu propose des orientations innovantes à l’attention des chercheurs en psychologie du langage et en didactique du français, des formateurs et conseillers pédagogiques, des enseignants de la maternelle et du primaire. L’association « Ti Filawo expérimente ces orientations pédagogiques dans un centre d’accueil d’enfants d’âge préscolaire. Le centre « Lakou Tifilawo » expérimente des pratiques alternatives pour l’école en Guadeloupe. Il s’agit, dans ce projet, de mettre à l’épreuve l’efficacité d’une approche constructive des savoir-faire communicatifs et langagiers, qui articule la diversité des pratiques langagières familiales avec la maîtrise du français standard, socle de la réussite scolaire. Ce séminaire sera l’occasion de découvrir et de discuter les choix théoriques et méthodologiques qui fondent cette nouvelle approche.
Le jeudi 28 avril 2016 de 16h30 à 18h00
« Interlecte et pédagogie de la variation »
Résumé : Les travaux de L.-F. Prudent, orientés sur les productions textuelles autant que didactiques et pédagogiques en Caraïbe, sont l’occasion incontestée de réfléchir au contact linguistique et à la genèse des langues créoles, au miroir des pratiques vernaculaires. Alors que le concept de déviance maximale proposé par Bernabé dans les années 70, soucieux de construire les normes d’un créole, trop longtemps déprécié, au détriment d’une description raisonnée des pratiques avérées, fait débat, l’auteur fait émerger le paradigme de l’interlecte, susceptible de rendre compte des pratiques discursives mouvantes des locuteurs d’outre-mer. Fort de ce constat, l’auteur propose ici d’exposer les implications didactiques et pédagogiques d’une étude des lectes en continuum par une pédagogie de la variation, capable de faire résonner les langues en contact dans un répertoire linguistique pluriel.
Le jeudi 17 mars 2016 de 16h30 à 18h (ESPE, amphithéâtre)
« Analyse interprétative de deux professeurs des écoles en mathématiques et en EPS en classe de CM2 »
M. Christian SILVY, Mme Marie-Paules POGGI et Mme Elisabeth ISSAIEVA
MCF à l’ESPE de Guadeloupe, Université des Antilles, CRREF
Résumé : La communication rend compte de l’activité interprétative de deux professeurs des écoles au cours de séances d’EPS et de mathématiques. La recherche s’inscrit dans le champ des travaux s’intéressant aux processus de contextualisation didactique. Qu’est-ce qui se passe dans la tête des élèves ? Organisation de l’activité interprétative de deux professeurs des écoles de Guadeloupe : entre analyse comparée et contextualisation didactique.
Le jeudi 4 février 2016 de 16h30 à 18h (ESPE, salle E3/E4)
« Les invariants-gènes liés aux concepts scientifiques : un outil pour le « comment transmettre » »
M. Pierre FLEURY
MCF à l’ESPE de Guadeloupe, Université des Antilles, CRREF
Résumé : La formation des enseignants interroge « le comment transmettre ». L’enseignement des concepts se pose dans ce cadre comme un défi tant ces objets sont complexes. En sciences physiques, les concepts semblent être adossés à des invariants-gènes spécifiques. Une première catégorisation de ces objets dans cette discipline est suggérée : invariant-gène, par transformation-conservation, par équilibre, par collection. Nous inférons que l’apprentissage des concepts en sciences physiques en est facilité si la scénarisation proposée favorise l’émergence de l’invariant-gène qui leur est associé. Nous questionnons alors l’intérêt que toutes les disciplines auraient à considérer leurs propres invariants- gènes dans une perspective didactique susceptible de rendre les concepts plus accessibles aux élèves. Le propos tenu sera articulé autour :
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de la genèse des invariants-gènes qui prend sa source chez les invariants-opératoires de Vergnaud (1985) – la catégorisation des invariants-gènes en sciences physiques sera illustrée ;
- de quelques cas concrets qui ont pu mette en évidence chez les élèves que les constructions des concepts et invariants-gènes associés semblent très intimes ;
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d’une tentative d’ouverture de la catégorisation suggérée des invariants-gènes à de nombreuses disciplines.
Le jeudi 28 janvier 2016 de 16h30 à 18h (ESPE, salle E3/E4)
« Les enseignants du primaire face à la pratique du redoublement : étude de leurs conceptions psychopédagogiques et de leur connaissance des recherches »
Mme Elisabeth ISSAIEVA MOUBARA-NAHRA
MCF à l’ESPE de Guadeloupe, Université des Antilles, CRREF
Résumé : Dans de nombreux pays, en particulier, dans les pays francophones, mais aussi dans ceux du Sud de l’Europe (Eurydice, 2011) et en Amérique latine (Labé, Motivans, Truong & Vasconcellos, 2012), la pratique du redoublement reste largement présente, bien que de nombreuses études concluent à son inefficacité, voire à ses effets négatifs (Crahay, 2005, 2007). Pour certains chercheurs (Draelants, 2009), « l’attachement » à cette pratique s’explique par l’ancrage fort d’une conception traditionnelle de l’école et la mise en avant des fonctions latentes du redoublement (gestion de situations problématiques et de l’hétérogénéité des élèves). Dans cette perspective, la pratique du redoublement serait compatible avec une série de raisonnements et de perceptions relatives aux élèves, à leurs capacités et façon d’apprendre. Pour vérifier cette hypothèse, la présente recherche a d’abord identifié une série de conceptions psychopédagogiques des enseignants ainsi que leurs croyances à l’égard du redoublement et leur connaissance des recherches à ce sujet. Ensuite, nous avons étudié dans quelle mesure les conceptions psychopédagogiques des enseignants ainsi que leur connaissance des recherches sur le redoublement affectent leurs croyances à ce propos. Deux principaux résultats ressortent des analyses réalisées. D’une part, il apparaît que la connaissance des recherches sur les effets du redoublement influence les croyances des enseignants à propos de cette pratique, les amenant à douter de ses bienfaits ou à en reconnaître les méfaits. D’autre part, contrairement à plusieurs de nos hypothèses opérationnelles, les conceptions des enseignants à propos du redoublement ne sont pas (ou relativement peu) affectées par leurs conceptions en matière d’apprentissage et d’intelligence. Ces résultats seront discutés en relation avec les théories classiques postulant que les croyances et les représentations sociales sont organisées en systèmes ou en réseaux.
Le jeudi 14 janvier 2016 de 16h30 à 18h (ESPE, salle E3/E4)
« La méthode biographique : une réponse aux défis de cohésion sociale et d’éducation plurilingue »
Mme Muriel MOLINIÉ
Professeure des universités à l’Université Sorbonne Nouvelle Paris 3, DILTEC-Dilfop
Résumé : Revendiquant ses filiations à la fois avec la sociologie clinique (récit de vie/de migration), le courant des histoires de vie en formation et celui de la sociodidactique du plurilinguisme (biographies langagières), la méthode biographique inspire aujourd’hui un ensemble d’éducateurs souhaitant instaurer à l’école et dans la Cité une interculturalité en récits et en actes. Il s’agit, pour cela :
- de reconnaitre les multiples facettes de notre diversité (le plurilinguisme, le pluriculturalisme de nos sociétés) ;
- de créer les médiations (inter-générationnelle, inter-disciplinaires, inter-culturelles…) qui seules, permettent de créer du sens et de la reliance.
L’exposé sera largement illustré par des expériences menées depuis les années 2000 dans le champ de l’éducation, de la formation et de l’intervention psycho-sociale.
Le jeudi 19 novembre 2015 de 16h30 à 18h (ESPE, salle E3/E4)
« Didactique des questions socialement vives »
Mme Laurence SIMMONEAUX
Professeure à l’École Nationale de Formation Agronomique
Résumé : Au cours de ce séminaire, le champ de la didactique des Questions Socialement Vives sera abordé au travers de trois focales :
- Les Questions Socialement Vives, des questions « réchauffées » ou « refroidies » dans l’enseignement ;
- Les effets paradoxaux de contextualisations locales sur l’enseignement de Questions Socialement Vives Environnementales ;
- La mobilisation des Questions Socialement Vives Environnementales à l’école pour favoriser la motivation, l’implication, l’engagement ou l’activisme environnemental.
Le jeudi 5 novembre 2015 de 16h30 à 18h (ESPE, salle E3/E4)
« Au coeur du Péyi Guadeloupe, Enquête sur une identité »
M. Willy MARZE
Journaliste reporter
Résumé : C’est au cours de ses nombreux voyages qu’il développe le goût d’écrire sur ses thèmes de prédilection : développement humain, rapport à l’environnement, traditions culturelles… Inaugurant la tradition du journalisme de récit, W. Marze nous invite à une découverte en immersion de la Guadeloupe au travers des enjeux linguistiques et sociologiques contemporains. C’est en suivant Jojo, tenancière d’un petit lolo sur le port de Sainte-Rose, que le lecteur s’embarque dans ce voyage. À travers elle, nous découvrons les temps forts de la culture guadeloupéenne et son ressenti sur la situation de son île…
Le jeudi 17 octobre 2015 de 16h30 à 18h (ESPE, salle E1)
« (Se) gouverner selon la nature et la vérité. Lire Émile ou de l’éducation de Jean-Jacques Rousseau avec Foucault et Deleuze »
Mme Valérie PÉREZ
PRAG en Philosophie à l’ESPE de la Guadeloupe et doctorante en philosophie
Résumé : Les questions inaugurales qui ont été à l’origine de notre travail de recherches concernaient la possibilité, pour l’éducation selon la nature telle que Rousseau la conçoit, d’instaurer les conditions dans lesquelles l’homme pourrait conquérir sa liberté et s’émanciper. Les études sur Rousseau sont déjà fort nombreuses. Pourtant, il nous a semblé que les problèmes que pose Rousseau, en particulier dans l’Émile, pouvaient recevoir un nouvel éclairage si on les confrontait à certains concepts fondamentaux de la philosophie française contemporaine. Les études sur la « gouvernementalité » de Michel Foucault dans ses cours au Collège de France ainsi que le concept deleuzien du « devenir » nous ont ainsi de permis de reposer certaines des grandes questions éducatives de Rousseau et de repenser le rôle de l’éducation dans les rapports que l’individu peut créer avec le monde, avec autrui et avec soi-même.